Un film doit avoir son très très méchant et son très très gentil. Et devinez qui gagne à la fin ?
Un méchant en or. LE méchant – très moche, très méchant, un traitre, un mauvais joueur, un monstre ? pas loin – s’appelle Lebron James. Il était dit que cet homme ne gagnerait pas cette année. Pas après sa « Decision », pas après avoir « trahi » Cleveland – parce qu’il n’avait pas le droit de changer d’équipe ! – pas après avoir « insulté » les anciens (MJ n’aurait jamais fait ça !). Depuis le 1er jour de la saison NBA, Lebron James a été enregistré dans la case de l’homme à détester, à huer. L’Homme à abattre.
Des héros terrassés. Pour que le film soit bon, il faut quand même de l’aventure et un méchant pas si facile à découper que cela. Alors Lebron a joué le jeu, prouvant toute la saison qu’il était bel et bien resté le meilleur joueur de cette planète, classant son équipe en 2nde position de Conf’, régnant sur les Top10 et la majorité des catégories statistiques.
Derrick Rose lui a chipé le titre de MVP – il sourit mieux – mais s’est fait rincer en playoffs. Les C’s – champions en titre à l’Est – n’ont pas survécu non plus. « Dark Lebron » était trop fort…
Un gentil très très gentil. Mais il était dit que la route du Heat se stopperait sur un « Je vous l’avais bien dit ! » En gros, il fallait prouver à James son mauvais choix. Tout le monde était d’accord mais les Bulls – candidats choisis par l’Amérique – ont failli. Du coup, les supporters se sont tournés vers les « petits hommes bleus » pour un remake du déjà peu original Avatar (mais plus gros succès de l’histoire en dollars ! Des chiffres qui parlent à Stern).
Une bande de Texans vivant à la cool, que personne ne prend vraiment au sérieux et qui se retrouve bombardée au centre de toutes les attentions. David contre Goliath. Le décor est planté.
Pas un héros, un anti-méchant. A la tête de l’escouade Mavs, Dirk Nowitzki. Ou tous les observateurs, journalistes, joueurs, coachs, analystes, plombiers, chômeurs ayant – à juste titre – affublé l’Allemand du surnom de « loser » subissent une amnésie temporaire : « Go Mavs !!! » devient le chant le plus populaire aux Etats-Unis. Normal, un ennemi commun rassemble toujours les peuples.
Dirk, lui, c’est le blond-blanc-gentil-humble-respectueux-fidèle à son club. Lebron, c’est le tatoué-méchant-frimeur-grande-gueule-traitre. A la George Lucas, David Stern a aligné les gros stéréotypes pour ne perdre personne en route.
La finale. Deux stars aux antipodes l’une de l’autre. Deux équipes construites différemment. La présentation laisse déjà présager la fin. Une escouade fabriquée à coups de millions, sans vécu ni collectif face à un roster de vieux briscards méritant tous d’enfin choper le graal. Dur de faire plus mièvre mais c’est ainsi. La NBA adore, le public aussi.
2-1. Suivant toujours un scénario pour le moins usé jusqu’à l’os, le méchant domine les débuts. Le héros est dans les cordes, mené et fébrile. 2 succès pour le Heat, 1 seul pour Dallas. Les méchants, froids et sanguinaires, ne sont pas loin du sacre. Comme dans les séries Z, c’est là que le « cerveau » du Mal livre ses secrets, son plan machiavélique au héros avant de se prendre les pieds dans le tapis.
Game 4. C’est bel et bien ce qui arriva dans le Game 4. Lebron James fut pathétique. 8 points, 3/11 aux tirs, 4 balles perdues et une défaite en appelant trois autres. Une parodie de basket pour un joueur qui n’avait jamais connu cela en huit ans de carrière. Jamais. Tombé du côté obscur de la Force, rattrapé par ses démons façon Anakin, il ne pouvait plus gagner.
Entre mièvres et réalités. L’happy End était donc bien lancée. Le Heat devenant une équipe hésitante pour la première fois des playoffs, au moment de conclure. Au moment de prouver aux critiques qu’ils avaient tort de critiquer ce trio fou aussi. Au moment où cela arrangeait tout le monde, en fait.
Les Mavs l’ont donc emporté grâce à des seconds-couteaux trop heureux de vivre une gloire qu’ils pensaient réservée aux être supérieurs de cette Ligue. Dallas c’est la victoire du peuple, de la bande qui y croit plus que les autres. Un sacre qui fait plaisir à tout le monde (ou presque), prouvant que « le basket est un sport collectif. » Et tous les journalistes mièvres de la planète de sortir « Je vous l’avais bien dit ! » (que cette association de malfaiteurs ne pouvait l’emporter !).
Dirk, le meilleur. 2nd MVP européen des finales après TP, Dirk est l’un des plus grands talents de l’Histoire de la balle orange. Son titre n’a rien d’usurpé et ne fait que vanter sa persévérance et son acharnement. Il le mérite et ne le doit qu’à lui. Un héros, un jedi presque. Surtout qu’il a vaincu les forces de l’ombre ! Mais la célébration texane a frôlé l’ambiance vomitive.
Mavs et bisounours. Jason Kidd et ses 38 printemps, ses mômes, sa femme, etc…Jet Terry, Tyson Chandler, JJ Barea, Shawn Marion….Une belle bande de losers ! Personne n’a jamais vraiment supporté cette escouade car elle n’a jamais fait rêver personne.
Trop gentille l’équipe de Cuban pour ne pas se faire braquer par Kobe ou les Spurs. Mais la NBA a changé et avait besoin d’un vainqueur « very nice » pour abattre les « very Méchants. » Sur ce point, Dirk ne possédait aucun concurrent.
Fin d’une époque ? La NBA formate telle une broyeuse tous les tempéraments. Quelques rebelles n’ont pu résister (type Iverson, JR Rider) mais bien souvent, les millions de dollars suffisent à assagir tous les représentants de la Ligue.
On le voit en ce moment, les nouvelles coqueluches se nomment Derrick Rose, Kevin Durant ou Nowitzki. On est très loin du charisme et des réactions colériques des anciens maîtres des bagues : Michael Jordan en tête, Kobe, Shaq ou encore les Celtics.
La hargne, la mauvaise foi, la rage, les fautes et quelques insultes ornaient leur domination sur la Ligue. Un modèle brisé sur l’autel de la médiatisation à outrance du côté de South Beach. Pour gagner désormais, il faut être corporate.
Tout le monde est content. Le bonheur des uns fait le malheur des autres. Quoique… Pour le coup, le bonheur des Mavs fait le bonheur de… tout le monde ! Mis à part en Floride (et encore), personne ne voulait voir le Heat l’emporter. Aussi, la Ligue ne peut que se féliciter des audiences record de cette année.
Si tout le monde déteste Lebron, personne ne manquerait un seul de ses matchs ! Là est bien l’injustice entourant le King. Le joueur le plus détesté étant également le plus populaire. Pour preuve, le « social MVP » sur NBA.com : James étant en tête avec 121 938 votes. En 2nde place, Dirk en compte à peine le quart : 33 647 voix.
James, born to lose ? Personne ne peut l’affirmer mais Lebron a vêtu l’uniforme du parfait méchant. Celui qu’on appréciera toujours voir perdre contre une histoire plus belle, un destin plus méritant, un collectif plus homogène. L’an prochain, Kobe a une revanche à prendre, Derrick Rose et Kevin Durant en auront terminé de leur puberté et les C’s se lanceront dans une dernière danse. Des escouades que l’Amérique supportera, surtout face à Miami. Et James de se dire qu’un destin de Loser l’attend.
A moins que…Comme il s’agit bien du talent le plus impressionnant de ce siècle en matière de basket, un titre viendra donc sûrement couronner sa carrière. Pour l’an prochain, un revival de « Rocky 3/ L’œil du tigre » par exemple. Cette saison, la rédemption inachevée. L’an prochain, le règne ?
MJ avait perdu contre Detroit – un collectif – puis Orlando – la relève d’alors – avant de lancer ses deux threepeat. Rocky, lui, se fait gifler par Mister T avant de retrouver ses cadavres de barbaque en chambre froide pour un énième come-back. Lebron en a reçu plus que n’importe qui des uppercuts. A lui maintenant d’enfiler le collant moulant du « gentil ayant compris ses erreurs du passé. » Ca a marché pou Kobe, pourquoi pas pour lui. Et lui-aussi aura ainsi droit à sa belle histoire.